Le 26 avril 1986 arriva la plus grave catastrophe nucléaire du XXe siècle. 33 ans après (au moment de ma visite du site), l’Homme ne vivant plus ici, la nature a repris ses droits. Avec la série de HBO qui retrace la catastrophe, ce lieu est devenu très touristique. Mais qu’en est-il de nos jours ?
J’ai pu visiter ce lieu un jour de novembre 2019. Départ de Kiev, 8 heures, -10°C.
Village de Zalissya.
Après 1h30 de trajet, me voici à Zalissya. Petit village au sud de la centrale qui a été lui aussi évacué. La nature a complètement repris ses droits. Je distingue à peine les routes, les arbres sont dans les parcs d’enfants, dans les jardins et parfois même à l’intérieur des maisons. Les personnes qui vivaient ici ont dû partir précipitamment, emportant avec elles le strict minimum. Je vois des livres de cuisine, des jouets d’enfants, des vêtements suspendus. Je rentre dans l’hôpital, tous les dossiers des patients sont encore là. Des brancards, table de gynécologie, lits sont toujours à leur place. C’est assez effrayant de voir tout cela. Tout s’est arrêté d’un coup. Pour avoir visité plusieurs fois le village martyr d’Oradour-sur-Glane, je trouve cet endroit encore plus impressionnant.
Ensuite, je passe le checkpoint de Leliv. C’est une sorte de frontière tenue par des militaires, mon passeport et mon droit d’entrée sont demandés. Un militaire me remet un compteur Geiger et je reprends la route. La visite de l’école de Leliv confirme cette impression que j’avais dans le précédent village. Le nom des enfants, le menu de la cantine, tout est encore affiché. Le dortoir avec des poupées sur les lits donne l’impression d’un film d’horreur.
Quand mon compteur Geiger commence à biper, mon guide me demande de remonter dans notre véhicule. Nous faisons une halte devant la centrale. Le sarcophage est immense. Il est la plus grande structure mobile terrestre avec ses 108 mètres de haut et 162 de large.
Ville de Prypiat
Nous partons maintenant pour Prypiat. Nous passons sur le «pont de la mort», rendu célèbre grâce à la série d’HBO. Arrivés dans la ville, nous roulons entre les bâtiments sur ce qu’il reste de route. Ici comme à Zalissya, peu importe la taille de la ville, la nature revient. À
voir comme cela, c’est dur de se dire que Prypiat était une ville futuriste pour l’époque. Cette ville a été construite pour la centrale. Tous les travailleurs vivaient ici et tout ce dont ils pouvaient avoir besoin se trouvait dans cette ville.
Nous commençons à visiter la piscine. Mon guide me montre une photo de cet endroit avant la catastrophe, aujourd’hui au milieu d’une forêt. Nous rentrons à l’intérieur découvrant le bassin et ses deux plongeoirs. Nous visitons ensuite une école technique, le grand restaurant, le stade, où l’on peut à peine deviner la piste d’athlétisme autour du terrain de football, qui lui a complètement disparu, remplacé par des arbres.
Nous croisons un chien, qui restera avec nous jusqu’à notre départ. Ils sont nombreux ici, les «chiens de Tchernobyl». Ils luttent contre la radioactivité, la faim, le froid et les prédateurs. Mon guide me déconseille de trop le caresser.
Nous visitons le parc d’attraction. Grande roue, auto-tamponneuses et autres manèges sont toujours là. Ensuite, visite du café et promenade le long du lac de refroidissement. Après cela, nous rejoignons notre véhicule. Le chien nous ouvre le chemin, il connaît la route. Nous passons devant l’hôpital, mon compteur Geiger se met à biper. L’hôpital est un des endroits les plus contaminés, car une pièce au sous-sol contient les vêtements des pompiers qui sont intervenus sur la centrale à la suite de l’explosion.
Un compteur prévient quand la dose normale limite qui est de 0,30μSv/h (microsievert par heure) est dépassée. Devant l’hôpital, elle est de 7,50μSv/h !
Radar Duga-1.
Nous rejoignons ensuite une ancienne base militaire secrète qui elle aussi a dû être évacuée. Ici est installé le Radar DUGA-1. Une des antennes permettant de protéger 90 %
de l’URSS en cas d’attaque de missiles. Cette antenne mesure 150 mètres de haut, pour 550 mètres de long. Avec cette dimension, elle était visible de loin. Elle a donc suscité beaucoup d’interrogations. À quoi pouvait bien servir une si grande structure métallique
dans une base militaire extrêmement protégée ? Certains pensaient qu’elle servait à contrôler l’esprit des soviétiques, d’autres pensaient à une antenne de communication avec les extraterrestres…
La nature plus forte que la radioactivité ?
Cette visite m’a montrée la force de la nature. A aucun moment elle a eu besoin de l’Homme pour revenir, et la radioactivité ne l’a pas empêchée de reprendre ses droits. La faune se porte également très bien ici. Les ours sont revenus, cohabitant avec les loups, les lynx, les pygargues à queue blanche, les chevaux de Przewalski et bien d’autre espèces.
Cela prouve bien une chose, l’homme est plus dangereux que la radioactivité.
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