L’or de Guyane

La Guyane, ce département si peu connu de la métropole est pourtant célèbre pour une chose, l’orpaillage illégal. Lutter contre ce fléau est une des missions de la gendarmerie, mission bien différente de celles menées partout ailleurs en France. 

Découvrez par cet article le désastre de ce sérieux problème que les gendarmes tentent de contrer quotidiennement.

L’Eldorado Guyanais.

C’est au milieu du 19e siècle que les premiers gisements aurifères furent découverts en Amérique du sud, principalement sur le “Plateau des Guyanes”. 

Depuis les années 90, un nouvel attrait pour ce métal voit le jour suite à une importante augmentation du cours de l’or. En effet, sur le marché légal, durant les deux dernières décennies sa cotation est passée de 10000€/Kg en 2002 à 51000€/Kg. On estime que 7 à 10 tonnes d’or sont illégalement exfiltrées de Guyane chaque année.

Il faut également savoir qu’il existe un cours de l’or illégal : l’or de la forêt. Quand le cours de l’or légal est à 51€ le gramme, celui de l’or illégal est à environ 35€ le gramme.

Désastre écologique.

Cet or de la forêt est un véritable fléau environnemental sur plusieurs points.

  • Déforestations : Les garimpeiros (travailleurs de l’or illégal) construisent des villages entiers dans la forêt sans se soucier des essences d’arbres utilisés.
  • Géologie :  D’importantes parcelles de forêt sont détruites pour la construction des mines.
  • Pollution : La vie sur les camps ressemble à une vie de nomade. Les Garimpeiros ne sont que de passages, donc laissent tout sur place (bouteilles, canettes, préservatifs,…).
  • Le mercure : Il est massivement utilisé pour séparer l’or du minerai. Il faut environ 1 Kg de mercure pour 1Kg d’or, mais jusqu’à 700g de mercure peuvent être récupérés après la réaction chimique. Tout ce mercure part ensuite dans les rivières et empoisonne les populations amérindiennes habituées à se nourrir de poissons.

Vivre sur une mine illégale.

Comme pour une entreprise classique, un patron gère une mine illégale. Il paye ses employés avec l’or extrait sur place. Le patron gagne environ 70% de l’or extrait par mois.

Voici le salaire moyen des autres métiers sur place :

  • Une cuisinière gagne 30g par mois.
  • Un ouvrier gagne 50g par mois.
  • Un porteur à pied (50 kg de fret) gagne 4g par jour.
  • Un pilote de quad gagne 25g par transport pour 200-250 kg de fret.
  • Un piroguier gagne de 60 à 80g par jour pour 1T de fret.
  • Les prostituées sont presque toutes “à leur compte”, elles payent le droit d’exercer sur les sites.

Pour donner une idée du coût de la vie sur place :

  • Pack de 4 cannettes (bières, coca,…) : 1g d’or.
  • 1Kg de riz ou farine : 0,1g d’or.
  • 30 œufs : 3g d’or.
  • 200L d’essence : 40 à 60g d’or.
  • 1 poulet : 1g d’or.
  • 1 moteur : 50g d’or.
  • 1 passe avec une prostituée : 10g d’or.

Pour rappel : 1g = 35€.

Le carburant est acheté au Brésil, tout le reste (moteurs et consommables, ainsi que le mercure) au Surinam.

Il faut également savoir que le mercure est interdit en France depuis 2006. Il est acheté en Chine via l’importante communauté chinoise du Surinam. 1Kg de mercure vaut entre 150 et 250€.

Le travail de la Gendarmerie.

Depuis 1997 existent les opérations Anaconda. Ces opérations consistent pour la Gendarmerie à repérer en hélicoptère les sites clandestins d’orpaillage puis à intervenir immédiatement pour détruire les moteurs des pompes ou des groupes électrogènes indispensables à l’orpaillage. Le but est de rendre l’exploitation de l’or non rentable et donc de décourager les futurs orpailleurs.

En 2008 sont créées les opérations Harpie. Celles-ci sont menées par la Gendarmerie et les Forces Armée en Guyane (FAG).

La gendarmerie mobile, la brigade fluviale ainsi que l’antenne GIGN de Guyane sont engagées sur ces opérations. Elles organisent régulièrement des missions d’une ou plusieurs journées en hélicoptères, pirogues ou par voie terrestre. Quand un camp de vie ou une mine est découvert, les gendarmes détruisent presque tout sur place, laissant uniquement les structures en bois des carbets pour éviter que les Garimpeiros continuent la déforestation. 

La superficie de la Guyane est presque équivalente à celle du Portugal. Elle partage 1240Km de frontière avec le Brésil et le Surinam. Une seule route traverse cette frontière, tout le reste est une frontière fluviale ou terrestre. Il existe deux postes de contrôle routier (PCR) de chaque côté de la Guyane (à Régina et à Iracoubo) qui permettent aux gendarmes de contrôler les véhicules qui entrent en Guyane.

Ces opérations uniques à la Guyane qui durent depuis presque 30 ans et malheureusement continueront tant qu’il y aura toujours un attrait pour ce métal si précieux. Plus de 95% de forêt tropicale recouvre la Guyane, il est donc extrêmement difficile de contrôler toute cette activité illégale, d’autant plus que la connaissance parfaite de la forêt par les Garimpeiros est un important avantage sur les gendarmes.

Cette expérience au côté des gendarmes fut pour moi très intense. Elle m’a permis de prendre conscience que cette convoitise pour l’or représente un réel fléau avec des conséquences humaines, sociales, environnementales et écologiques qui amène la gendarmerie à effectuer un travail structuré hors norme.